TSAI Ing-wen, « Taiwan and the Fight for Democracy. A Force for Good in the Changing International Order », Foreign Affairs, November/December 2021. Online: https://www.foreignaffairs.com/articles/taiwan/2021-10-05/taiwan-and-fight-democracy ©2021 Council on Foreign Relations, Inc. All Rights Reserved.
« Taiwan and the Fight for Democracy. A Force for Good in the Changing International Order » : la présidente TSAI Ing-wen publie, le 5 octobre 2021, un long texte dans la revue américaine Foreign Affairs.
Sous le titre « Taïwan et la lutte pour la démocratie. Une force du bien au sein d’un ordre international changeant », elle y explique l’importance de défendre la démocratie taïwanaise, et la place de Taïwan sur la scène internationale. « Taïwan est à la fois profondément démocratique et occidentale, mais également influencée par la civilisation chinoise, et façonnée par les traditions asiatiques. » « Taïwan, en raison à la fois de son existence même, et de sa prospérité, représente à la fois un affront au récit, et un obstacle aux ambitions régionales, du Parti communiste chinois. » Ce qui explique que Pékin adopte une posture de plus en plus agressive, attestée par l’activité croissante de l’Armée populaire de libération dans le détroit de Taïwan depuis 2020 : les incursions aériennes massives sont désormais quasi quotidiennes dans la zone d’identification de défense aérienne (ADIZ) taïwanaise.
« Malgré ces développements inquiétants, le peuple de Taïwan a clairement indiqué au monde entier que la démocratie n’est pas négociable » : la cheffe de l’Etat rappelle que son gouvernement a fortement investi depuis 2016 dans les capacités d’auto-défense du pays, et s’emploie à réformer et renforcer ses forces armées. « Taïwan ne recherche par la confrontation militaire. L’île souhaite une coexistence pacifique, stable, prévisible et mutuellement bénéfique avec ses voisins. Mais si sa démocratie et son mode de vie sont menacés, Taïwan fera tout ce qui est en son pouvoir pour se défendre. » Taïwan ne pliera pas sous la pression, et les Taïwanais « se soulèveraient si l’existence de Taïwan était menacée », car « la démocratie n’est pas négociable. » Elle réitère un appel à des discussions avec la Chine, à conditions qu’elles se déroulent dans un esprit d’égalité, et sans conditions politiques préalables – ce que Pékin a rejeté à plusieurs reprises.
Elle insiste également sur le fait que la capacité future de Taïwan à survivre et à prospérer en tant que démocratie libérale dans un environnement menaçant ne peut qu’avoir d’importantes implications dans les relations internationales. La prise de conscience de la menace que représente le Parti communiste chinois, ne devrait qu’inciter les Etats à se rapprocher de Taïwan. Car « si Taïwan devait tomber aux mains de la Chine de Pékin, les conséquences en seraient catastrophiques pour la paix régionale, et pour les systèmes d’alliance démocratique. Cela indiquerait que dans la concurrence des valeurs dans le monde d’aujourd’hui, l’autoritarisme l’aurait emporté sur la démocratie .».
Quelques jours après la publication du texte de Mme TSAI dans Foreign Affairs, et alors qu’un nombre record d’avions de combat chinois pénétraient dans l’ADIZ de Taïwan, et la présidente taïwanaise, et le dirigeant communiste ont chacun prononcé un discours à l’occasion du 10 octobre (le Double-Dix), commémoration du soulèvement de 1911 qui a mené à la fondation de la République de Chine . Le discours de XI a évité la rhétorique militaire qu’il pratique volontiers, et a parlé de « réunification pacifique » – l’absorption de Taïwan par la Chine. Mais le terme sonne d’autant plus faux pour les Taïwanais que la situation à Hong Kong montre bien ce que sont les objectifs de Pékin : les Hongkongais ont été interdits de célébration du 10 octobre, et la maison de SUN Yat-sen à Hong Kong a été encerclée par la police. Et les médias du continent ne se sont pas privés de décrire de manière détaillée la façon dont Taïwan serait écrasée en cas de guerre suivant une déclaration d’indépendance de Taipei. De son côté, TSAI a souligné l’oppression politique croissante en Chine et à Hong Kong, et rappelé une double volonté de Taïwan : engager des pourparlers d’égal à égal avec Pékin ; mais aussi se défendre en cas d’attaque. Quelques jours plus tard, la présidente révélera d’ailleurs la présence sur le sol taïwanais d’un certain nombre de militaires américains participant à l’entraînement des forces armées.

Dessin de la caricaturiste taïwanaise Stellina Chen (Cartooning for Peace), paru en première page du Monde le 12 octobre 2021.