
Condie Rice prête serment comme secrétaire d’Etat, janvier 2005
Si elle a été formulée explicitement par l’administration Obama en 2011, l’idée d’un « virage vers l’Asie » (shift to Asia) avait germé et connu un début de mise en œuvre sous l’administration républicaine de George W. Bush (2001-2009). Le vice-président Richard « Dick » Cheney et la conseillère à la Sécurité nationale (National Security Advisor), future secrétaire d’État, Condoleezza Rice ont alors travaillé à la mise en place d’un système d’alliances anti-chinoises en Asie.
Les lignes directrices en avaient été énoncées par Condoleezza Rice en janvier 2000 dans Foreign Affairs1. Elle y met en garde contre les efforts de Pékin visant à «modifier l’équilibre des forces en Asie », à quoi les Etats-Unis doivent répondre « en approfondissant leur coopération avec le Japon et la Corée du Sud […] en garantissant la sécurité de Taïwan» et en «maintenant leur engagement à assurer une présence militaire robuste dans la région» (« Power matters for the National interest ») . Washington doit «accorder une plus grande attention au rôle de l’Inde» ; renforcer le dialogue avec les grandes organisations régionales, notamment l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN, un organe politique, économique et culturel regroupant 10 pays2), ou le Sommet de l’Asie orientale (East Asia Summit, EAS, une enceinte de sécurité régionale réunissant annuellement 18 pays depuis 20053).
C’est en ce sens qu’en 2007, l’administration Bush soutiendra une proposition japonaise visant à créer un dialogue de sécurité quadrilatéral (Quadrilateral Security Dialogue, QUAD) entre les États-Unis, le Japon, l’Inde et l’Australie. Et que commence en 2008 la négociation d’un traité de libre-échange transpacifique (Transpacific Partnership, TPP). Mais les engagements militaires américains de plus en plus importants au Moyen-Orient (Afghanistan, Irak) bloquent largement ce tropisme vers l’Asie. Mais les arguments, objectifs et moyens exposés par Condie Rice en 2000 seront largement repris, une décennie plus tard, par l’administration Obama.
DOCUMENT
RICE Condoleezza, « Campaign 2000. Promoting National Interest, » Foreign Affairs, January-Feb. 2000, vol.79, no 1, p.45-62. URL : https://www.academia.edu/9510896/Promoting-National-Interest-Rice-Foreign .
NOTES
1 RICE Condoleezza, « Campaign 2000. Promoting National Interest, » Foreign Affairs, January-Feb. 2000, vol.79, no 1, p.45-62. URL : https://www.academia.edu/9510896/Promoting-National-Interest-Rice-Foreign . Rice est alors conseillère pour les affaires étrangères du candidat Bush.
2 Malaisie, Indonésie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Brunei, Viêt Nam, Laos, Birmanie, Cambodge
3 Les dix pays de l’ASEAN; les trois de l’ASEAN+3 : Japon, Corée du Sud, Taïwan; plus l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Pakistan ; les Etats-Unis depuis 2011; l’Ukraine depuis 2023.
