
Ces dernières années, et en particulier depuis l’accession au pouvoir de Xi Jinping en 2012, et la construction d’une flotte qui dépasse désormais largement en volume celle des Etats-Unis, Pékin entend affirmer au quotidien sa souveraineté totale sur les mers de Chine orientale et méridionale, en maltraitant pour cela et le droit international, et les intérêts des Etats riverains. La Chine revendique également – et légitimement – un libre accès au Pacifique et à ses eaux profondes, indispensables, en particulier, pour le déploiement de ses sous-marins nucléaires lanceurs d’engins. Or, cet accès passe par des détroits contrôlés par les alliés des Etats-Unis: principalement le détroit japonais de Miyako, dans l’archipel des Ryūkyū ; le canal de Bashi, entre Taïwan et les Philippines ; le canal qui sépare Taïwan de Yonaguni, la plus occidentale des îles japonaises de l’archipel des Ryūkyū (ou archipel Nansei). Sa localisation fait de Taïwan, dont Pékin revendique la souveraineté, LE verrou central de cette première chaîne d’îles, et donc un enjeu géopolitique décisif.
La cartographie géopolitique traditionnelle, orientée de manière méridienne, traduit inconsciemment ou volontairement la vision occidentale (et très « guerre froide ») de ces enjeux. Elle rend moins bien compte de la perception chinoise qu’une cartographie « vue de Chine » et orientée vers le Pacifique, et de ce que représentent les trois « chaînes d’îles ». Ce que nous nous sommes efforcé de représenter, grâce au talent du cartographe Cyrille Süss, dans la livraison de Questions internationales no 124, avril-mai 2024, dans notre article sur « La grande stratégie américaine vers l’Asie et l’Indo-Pacifique : un bilan contrasté » (accessible ici) .